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ciale, qu’elle constituerait non pas en paroles, mais en fait l’égalité et la fraternité, que le peuple, devenu libre, saurait créer lui-même son propre bonheur et le bonheur général.

Au lieu de tout cela, elle vit la lutte des classes et de petits groupes politiques les uns contre les autres, elle vit la « politique » engloutir le « socialisme ». Elle dut se convaincre que non seulement la révolution sociale, mais même certaines réformes sociales, ne pourraient être acquises que par les efforts de toute une génération, lorsque les esprits et les âmes auraient changé, et non pas la seule forme de gouvernement ; lorsque les masses seraient moins aveugles et sauraient mieux distinguer leurs ennemis de leurs vrais amis ; lorsque les meneurs politiques seraient moins occupés de leurs querelles personnelles et de leurs intérêts de partis, et plus adonnés à la cause du peuple.

George Sand ne se sauva pas devant les horreurs de la guerre civile, comme on le dit généralement (phrase plus emphatique qu’exacte), mais elle se détacha des hommes politiques et de leur activité, parce que les uns n’avaient pas justifié ses espérances et que l’autre ne correspondait pas à ses aspirations et à ses croyances intimes.

Quant à ces croyances mêmes, elle ne les perdit pas et garda sa foi dans le socialisme et dans la République.

Non seulement elle ne renia pas ce qu’elle avait écrit, dans ses articles politiques de 1848, mais elle continua en 1849 et 1850 à dire carrément ses opinions, alors que la réaction triomphante fit taire tant d’autres voix. Il suffit, pour s’en convaincre, de relire ce qu’elle dit de ses opinions politiques et de ses amis politiques dans la préface au livre de Victor Borie ou encore dans l’Histoire de ma vie, parus entre 1850-1855, c’est-à-dire au plus fort de la réaction.

Après avoir expliqué ce qui fit accourir George Sand à Paris, en février de 1848, nous allons montrer ce qui l’en fit partir désillusionnée, non du fait, mais des faiseurs.

M. Hippolyte Monin, dans un long et très intéressant article, paru dans la Révolution française de 1899-1900, a narré, avec beaucoup de précision et de détails, la part qu’avait prise George