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du langage en faveur de la grandeur et de la sainteté de mon but.

Agréez, madame, l’assurance de mon dévouement ainsi que de mon profond respect.


M. Bakounine.
Paris, rue Saint-Dominique, 96, faubourg Saint-Germain.

Je viens de recevoir à l’instant même l’ordre de quitter Paris et la France, pour avoir troublé l’ordre et la tranquillité publique. Permettez-moi donc, madame, avant de partir, de vous exprimer ma gratitude pour la bienveillance et la bonté que vous m’avez toujours témoignées ; croyez à mon dévouement profond, inaltérable, et gardez un petit souvenir à un homme qui vous a vénérée, avant même d’avoir fait votre connaissance, car vous avez été pour lui souvent et dans les moments les plus tristes de la vie une consolation et une lumière.

Mon adresse, si vous voulez bien me répondre, est : Paris. Rue de Bourgogne, 4, Faubourg Saint-Germain. M. Reichel, professeur de musique, pour remettre à M. Back.


Nous avons retrouvé aussi la réponse de George Sand à Bakounine :

Je ne sais pas, monsieur, si la poste a cru devoir me supprimer votre envoi, mais je ne l’ai point reçu. J’avais lu par fragments dans les journaux les belles paroles que vous avez prononcées et pour lesquelles vous savez bien que mon approbation sincère et ma vive sympathie vous étaient acquises, puisqu’elles sont l’expression de sentiments que je partage avec vous depuis que j’existe. Ces sentiments sont plus méritoires chez vous que chez moi, car vous leur avez fait de grands sacrifices, et ils attirent sur vous une persécution qui vous atteint, même en France, ce noble pays qui use les derniers anneaux de sa chaîne et qui réparera tous les crimes qu’on commet en son nom. La mesure odieuse prise contre vous indigne toutes les âmes honnêtes, vous n’en pouvez pas douter. Elle contriste la mienne en particulier, croyez-le bien. J’espère pour mon pays (et je crois trop à l’action divine pour croire à un long abaissement de la France) que vous y rentrerez avant longtemps et que je vous serrerai encore la main avec toute l’estime que je vous dois et l’intérêt que je vous porte.

George Sand.

Nohant, 1er janvier 1848.