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Là-dessus, tous les autres maçons se sont mis à gueuler dans les corridors, pour me faire entendre qu’ils savaient tous chanter, depuis le maître maçon, qui chante du Donizetti comme un savetier, jusqu’au goujat, qui imite assez bien le chant du cochon. Mais ça ne me touche pas, et chacun envie le sort de Jean Chauvet…

Le 25 septembre 1853, George Sand écrit à son fils :

Cher vieux, tu dois avoir reçu un mot de moi et de Manceau où nous te disions notre arrivée à bon port. Le jour de notre arrivée[1] il a passé sur la route un pifferaro napolitain, que j’ai happé bien vite ; ce n’était pas un fameux maître sonneur ; mais sa musette est bien autrement belle de sons que les nôtres, et il jouait des airs qui avaient beaucoup de caractère. Il y avait avec lui deux musiciens de Venise, sans aucune couleur locale, et un jeune homme qui dansait très joliment, très sérieusement, et les yeux baissés des cachuchitas et des jotas, d’une manière si pareille aux paysans maïorquins, et il en avait si bien les airs et le type, que j’aurais juré que c’en était un. Il m’a dit qu’il était de Tolède et qu’il dansait à la manière des gens de son pays. Alors c’est absolument la même chose qu’à Maïorque…

Le 13 décembre de la même année elle lui écrit encore :

J’ai été avant-hier au spectacle de la Châtre, entendre des chanteurs montagnards fort intéressants…

Ce qui avait été le sujet des reproches de Tourguéniew et de Gustave Planche, l’effort de George Sand d’écrire ses romans champêtres en langue populaire, en ne choisissant de l’idiome berrichon que les tours et les expressions qui puissent être compris sans traduction, ce tour de force que la romancière s’était imposé, en se privant de la richesse habituelle de son vocabulaire pour entrer dans ce cadre, fut autant apprécié par les philologues et les linguistes, que les renseignements sur la musique populaire par les musiciens de profession.

Et de même que M. Tiersot parlait de ce roman dans son livre, plusieurs doctes auteurs de glossaires d’idiomes : MM. Godefroy, Darmstetter et Hatzfeld, le comte Jaubert, Sachs[2]

  1. Ces deux lignes sont omises dans le vol. III de la Corr.
  2. V. Godefroy, Dictionnaire de l’ancienne langue française ; Darmstetter et Hatzfeld, Dictionnaire général de la langue française ; Jaubert, Glossaire