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pièce intitulée le Grillon (die Grille), jouée sur toutes les scènes allemandes, fit remporter des triomphes à une quantité d’ingénues allemandes, la célèbre Raabe en tête. Enfin en 1869, MM. Semet et Bazille en firent un opéra-comique[1]. Quant à François le Champi, George Sand en fit elle-même une pièce, jouée avec grand succès vers la fin de 1849 à l’Odéon ; ce succès encouragea l’auteur à revenir à l’art dramatique, abandonné après le fiasco de Cosima en 1840. Nous parlerons plus loin de François le Champi comédie, ainsi que des deux autres pièces rustiques de George Sand où apparaissent aussi ses chers berrichons, — Claudie et le Pressoir.

Disons seulement dès à présent que si Tourguéniew avait blâmé chez George Sand romancière l’emploi du patois, Gustave Planche, lorsque parut Claudie, désapprouva George Sand dramaturge de vouloir faire parler ses personnages « un langage qui ne fût point en désaccord avec leurs idées », c’est-à-dire qu’il lui reprocha un excès de réalisme :

… Le style de Claudie est pareil au style de Champi ; c’est la même naïveté et parfois aussi, je dois le dire, le même enfantillage. Les locutions berrichonnes que le public parisien admirait, dans le Champi, se retrouvent à chaque scène de Claudie. Quel que soit l’engouement de la foule pour ces locutions, je n’hésite pas à les condamner, car elles impriment au langage un singulier cachet de monotonie. Ces locutions, d’ailleurs, n’ont rien qui appartienne en propre au Berry, a quelques lieues de Paris, en parcourant les fermes et les villages, on peut retrouver, ou peut s’en faut, toutes les formes de langage que l’auteur de Claudie nous donne comme berrichonnes. Cette fantaisie, qui a excité l’ébahissement de la foule, n’est pour moi qu’une fantaisie puérile. Je comprends très bien que Molière, ayant à mettre en scène des paysans, leur prête le langage de leur condition, et pourtant, malgré toute son habileté, il lui arrive parfois de lasser l’attention du spectateur ; je n’en citerai qu’un exemple, que chacun a déjà nommé d’avance, le dialogue de Mathurine et de Pierrot dans Don Juan. Ce que Molière avait fait pendant quelques minutes avec un succès très douteux, l’auteur de Claudie a voulu le faire pendant trois heures, et malgré

  1. Mme Viardot avait aussi eu l’intention d’écrire un opéra sur un livret tiré par M. Louis Viardot de la Petite Fadette, mais ce projet ne fut pas mené à bout.