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redit durant les trois journées de réjouissances obligatoires, précédant et suivant le mariage à l’église. (Une coutume rappelle de point en point les intermèdes des saturnales romaines et les personnages mêmes portent les noms de payen et de payenne.)

Tous ceux qui s’intéressent aux études d’ethnographie comparée, au folklore et à l’histoire de la culture, liront et reliront avec le plus grand intérêt ces pages alertes et spirituelles. Car cette étude (comme tout ce que George Sand a écrit sur la vie du peuple) arrête notre attention par sa compréhension remarquable et son entente à saisir et à fixer pour les générations à venir les mœurs, les chansons, les coutumes, tous les détails curieux et caractéristiques, qui se perdent chaque jour.

Les deux séries d’esquisses intitulées Mœurs et coutumes du Berry et Visions de la nuit dans les campagnes[1] offrent le même intérêt, elles font revivre les légendes et les histoires des bonnes vieilles femmes, les superstitions du Berry et les traditions locales, contées avec la candeur des narrateurs rustiques. Nous y trouvons encore des pages consacrées à la comparaison des chansons bretonnes et berrichonnes, qui feraient honneur à un ethnographe de profession, soucieux d’étudier la transmission des légendes et des chansons d’une peuplade à une autre.

George Sand se rendait compte de l’intérêt qu’il y avait à préserver de la disparition les monuments de la poésie populaire, aussi appelait-elle dans cette étude l’attention des lecteurs sur l’ouvrage de M. de La Villemarqué consacré à la poésie bretonne et intitulé : les Barza Breiz. Et ceci à une époque où l’intérêt pour les études et les recherches des œuvres créées par le peuple ou sur la vie du peuple s’éveillait à peine[2] !

Revenons aux pages des Noces de campagne. Il en est une que relira chaque amateur d’ethnographie, et chaque admira-

  1. Ces deux séries d’articles parurent d’abord dans l’Illustration de 1851-52 comme texte aux dessins de Maurice Sand, représentant les visions et les superstitions du Berry. Plus tard, elles furent réimprimées dans les volumes des Œuvres complètes. (Les légendes rustiques, La dernière Aldini et les Promenades autour d’un village.)
  2. En 1875, Mme Sand fit preuve d’un intérêt toujours vivace pour ces questions en consacrant un article (dans le Temps) au livre de M. Laisnel de la Salle : Croyances et Légendes du centre de la France.