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de la communauté trouvera sous la main un lieu de repos et de distraction, — le luxueux parc préalablement planté par le marquis prévoyant ; ce parc ne sera donc plus l’amusement et le luxe d’un seul gentilhomme propriétaire, mais bien un lieu de délices et de repos commun[1]. Et le loup, c’est-à-dire M. Cardonnet père, voyant que son fils n’épouse point une pauvre demoiselle, fille illégitime d’un gentillâtre ayant renié tous les privilèges et tous les apanages de sa caste, mais bien la riche héritière d’un seigneur titré, consent à ce mariage. Au fond, tout le roman se réduit à cette lutte entre le père pratique, voulant que son héritier augmente son capital, et le fils idéaliste, ne rêvant qu’égalité sociale et blonde Gilberte. Grâce à ces rêves d’une part, il conquiert l’amitié du marquis excentrique, et, de l’autre, il contribue involontairement à la réconciliation du vieil original avec le comte de Châteaubrun qui lui avait ravi sa femme, ainsi qu’avec sa fille Gilberte, et enfin avec l’ami de M. Antoine, le braconnier, vagabond et charpentier Jean Jappeloup. Le marquis avait jadis subitement privé ce dernier de son amitié et de sa clientèle, le croyant complice de l’intrigue amoureuse qui brisa sa vie.

La fable du roman est donc passablement naïve et se ressent du bon vieux temps, où les auteurs aimaient tant à toucher les lecteurs sensibles, en leur contant les amours de deux jeunes gens opprimés par de méchants tuteurs, ou les souffrances de quelque jeune fille noble et pauvre, retrouvant enfin ses vrais parents ou un oncle bienfaisant, qui l’adopte au

  1. De Latouche écrivait à l’auteur, à propos de la fin de ce roman : « Je vous dois donc de dire que la fin de ce roman me semble un peu précipitée, que la mère d’Émile disparaît d’une manière un peu trop absolue, qu’il manque dans le passage de l’amitié conservée par le comte pour le marquis un petit lampion qui l’éclaire, qu’on voudrait savoir quel genre d’usine met en mouvement la Gargilesse et qu’enfin le communisme non défini de M. de Boiguilbaut laisse bien froids les lecteurs qui ne sont pas d’avance initiés dans le but du progrès social. Votre mission eût été là de faire comprendre, de vulgariser par l’éloquence les futurs résultats de la doctrine. Le mot communisme n’a encore aucun sens pour la moitié des bourgeois qui sont de bonne foi. Expliquez-leur donc ce que vous voulez. Concluez, comme vous disait autrefois un homme que vous estimiez sous le nom d’Everard… »