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ou de Véron, car il appert de la lettre même qu’elle fut écrite avant le 15 août et non après ; cela doit être probablement le 21 juillet.

Ces quatre lettres nous renseignent sur la manière de travailler de George Sand : elle n’a aucun plan fixé d’avance ; elle ignore même le titre de son roman ; elle n’a qu’une idée vague ou plutôt une rêverie conçue en sommeillant ; elle voudrait la faire mûrir à son aise, mais le temps presse ; elle se met au travail presque à contre-cœur, mais le sujet se développe à son insu, il commence à « l’amuser » et elle mène le roman à bout, aussi facilement et spontanément que si ce n’était pas elle qui travaillait à son œuvre, comme si elle ne faisait que transcrire un roman tout prêt que quelqu’un lui aurait dicté.

C’est ce que Zola disait de George Sand :

Quand elle commençait un roman, elle partait d’une idée générale assez obscure, confiante en son imagination. Les personnages se créaient sous sa plume, les événements se déroulaient ; elle allait ainsi, tranquillement, jusqu’au bout de sa pensée. Il n’y a peut-être pas en littérature un second exemple d’un travail aussi sain, aussi exempt de fièvre. On aurait dit une source d’eau qui coulait toujours avec un égal murmure. La main gardait un mouvement rythmé, l’écriture était grosse, calme, d’une régularité parfaite, le manuscrit souvent ne portait pas la trace de la moindre rature. Il semblait que quelqu’un dictait et que George Sand écrivait.

Malgré tous les efforts laborieux de l’auteur, le roman d’Au jour d’aujourd’hui ne parut pas chez Véron : il semble qu’outre l’incapacité de Mme Sand de travailler à terme fixe, ce furent les tendances socialistes du roman qui en furent cause. On peut du moins le conclure d’une série de lettres de de Latouche, et entre autres de la lettre non datée que voici. Elle renferme, de plus, quelques observations critiques dont tint compte George Sand lors des éditions ultérieures de son roman :


Mercredi.

Vous avez raison de croire, amie, que je ne donnerais à personne, à vous moins qu’à tout autre, un conseil que je ne suivrais pas pour