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est aussi dans l’erreur en indiquant par une note en marge de ces lignes que « forcé de s’absenter durant la dernière maladie de Chopin il ne revint que pour recevoir son dernier soupir ». Ce fait est inexact : d’après la déclaration catégorique de Mme Ciechomska, née Jedrzeiewicz[1], Gutmann ne vit sa mère, Mme Louise Jedrzeiewicz, que lors de sa visite de condoléance après la mort de Chopin, il n’assista donc pas à l’agonie du grand maître, durant laquelle Mme Jedrzeiewicz et sa fille ne quittèrent pas leur frère et oncle.)

Notons au contraire dans ce passage de l’Histoire de ma vie la constatation du fait (indubitable et ayant sa valeur biographique) que pendant cette dernière et unique entrevue de George Sand et de Chopin, après une séparation d’une année, ou peu s’en faut, il n’y eut aucune explication, que le grand musicien et l’illustre femme se séparèrent comme de simples connaissances qui se seraient rencontrées par hasard dans l’escalier, chez des amis. Tous les racontars de Karasowski et compagnie assurant que George Sand se serait approchée de Chopin, pendant une soirée, dans un salon, en sortant subitement de derrière un treillage, qu’elle lui aurait chuchoté quelques paroles et aurait versé des larmes, sont tout aussi légendes que les légendes composées sur leur première entrevue. L’accord final, comme le premier, fut simple et ne sortit pas des limites du bon ton (qu’on nous pardonne ce calembour involontaire dans un pareil moment).

Si dans ce passage de l’Histoire de ma vie, on peut facilement reconnaître sous le nom des « bons cœurs qui ne surent pas s’y prendre » la princesse Anna Czartoryska et Grzymala ; sous celui de ceux qui « aimèrent mieux ne pas se mêler d’affaires délicates » deviner peut-être Mme Marliani, malade alors et qui mourut peu après, on doit certainement entendre Solange et Mlle de Rozières par les « mauvais cœurs ». Il est curieux que George Sand en écrivant son Histoire et en faisant comme le bilan de ses relations avec Chopin, semble avoir tiré cette expression même : « Il y eut de mauvais cœurs entre nous »,

  1. Voir le Kuryer Warszawski du 9 août 1882, n°177.