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chez son père. Par un enchaînement de circonstances bien singulier ce ne fut personne d’autre que Chopin qui communiqua cette nouvelle à Mme Sand, arrivée à Paris après les journées de Février. Or, Chopin, désireux de voir Solange réconciliée avec sa mère, se réjouissait en apprenant qu’elles avaient échangé des lettres, etc., etc. Il s’empressa donc de conter immédiatement la circonstance à Solange :


Paris, 5 mars 1848.

Je suis allé hier chez Mme Marliani[1], et en sortant, je me suis trouvé dans la porte de F antichambre avec Madame votre mère, qui entrait avec Lambert. J’ai dit un bonjour à Madame votre mère et ma seconde parole était s’il y avait longtemps qu’elle a reçu de vos nouvelles. « Il y a une semaine, m’a-t-elle répondu. — Vous n’en aviez pas hier, avant-hier ? — Non. — Alors, je vous apprends que vous êtes grand’mère. Solange a une fillette, et je suis bien aise de pouvoir vous donner cette nouvelle le premier. » J’ai salué, et je suis descendu l’escalier. Combes, l’Abyssinien (qui, du Maroc, est tombé droit dans la révolution), m’accompagnait ; et comme j’avais oublié de dire que vous vous portiez bien, chose importante pour une mère surtout (maintenant, vous le comprendrez facilement, mère Solange), j’ai prié Combes de remonter, ne pouvant pas grimper moi-même, et dire que vous alliez bien et l’enfant aussi. J’attendais l’Abyssinien en bas, quand Madame votre mère est descendue en même temps que lui et m’a fait avec beaucoup d’intérêt des questions sur votre santé. Je lui ai répondu que vous m’avez écrit vous-même au crayon deux mots le lendemain de la naissance de votre enfant, que vous avez beaucoup souffert, mais que la vue de votre fillette vous a fait tout oublier. Elle m’a demandé comment je me portais, j’ai répondu que j’allais bien, et j’ai demandé la porte au concierge. J’ai salué et je me suis trouvé square d’Orléans à pied, reconduit par l’Abyssinien…

Mme Sand de son côté décrit sa rencontre avec Chopin à Augustine qu’elle avait laissée, durant son absence de Nohant, à la Châtre, sous la garde de Mme Eugénie Duvernet[2].

  1. Mme Marliani avait aussi quitté le square d’Orléans et habitait depuis quelques années rue Ville-l’Évêque, n° 18.
  2. Fait confirmé par les lettres inédites de Mme Sand à Mlle Augustine, démocratiques en saintetés, avec la même dextérité que le ferait Herr Dohler. Geoffroy est devenu sainte Geneviève, Il vient de recevoir une commande de 4000 francs de la ville pour un bas-relief ; cela le remonte moralement ; il en a besoin, car il ne sait sur quel pied danser et ceci influe sur sa tête…, etc.