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événements, Mme Sand raconte les faits comme suit aux époux Poncy et à Mlle de Rozières :

Mes enfants, ma fille Solange est mariée d’hier, bien mariée avec un galant homme et un grand artiste, Jean-Baptiste Clésinger. Elle est heureuse. Nous le sommes tous. Mais nous sommes sur les dents, car jamais mariage n’a été mené avec tant de volonté et de promptitude… M. Dudevant a passé trois jours chez moi et le voilà reparti. Il nous fallait le saisir au vol dans un bon moment et nous n’avons pas même eu le temps d’avertir nos amis à une lieue à la ronde. Nous avons fait venir le maire et le curé, au moment où ils y pensaient le moins et nous avons marié comme par surprise. C’est donc fini, et nous respirons[1].

En annonçant à Mlle de Rozières que le grand événement a enfin eu lieu la veille, Mme Sand s’empresse de lui dire que « Chopin lui écrit qu’il est lui-même sur le point de partir pour la campagne, et puisqu’il va tout près, il sera bien facile qu’il revienne quand je serai arrivée… » (Il est difficile de dire si ces mots répondent à une question de Mlle de Rozières ou s’ils recèlent une intention précise). Immédiatement après Mme Sand revient à la description de la noce, parle de l’arrivée du « baron et de sa suite », et dit que « jamais mariage ne fut moins gai, en apparence du moins, grâce à la présence de cet aimable personnage dont les rancunes et les aversions sont aussi vives que le premier jour. Heureusement qu’il est parti à quatre heures du matin le lendemain du mariage[2]… ». Pour comble d’agrément, dit-elle, elle-même s’était démis le pied et on dut la porter à l’église[3].

  1. Extrait publié par M. Rocheblave dans la Revue des Deux Mondes.
  2. Nous avons déjà cité les lignes de cette lettre inédite dans le deuxième volume de notre ouvrage, au chapitre xi.
  3. À la fin de la lettre à Mazzini, datée du 22 mai 1847 et imprimée dans le tome II de la Correspondance (p. 364-366), on a omis les lignes suivantes (venant après les mots : f espère la durée de cet amour et de cet hyménée) : « J’ai eu la gaucherie de me casser un muscle à la jambe et de me le recasser pour avoir voulu marcher trop vite. Voilà pourquoi, ne pouvant faire un mouvement et vous écrivant au milieu de la nuit, je me sers de ce mauvais bout de papier qui finit et ne me laisse plus de place que pour vous dire que je vous respecte et vous aime. »