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l’autre du Stradella, un autre encore du Bellini, un quatrième une prière d’église !

La déclaration formelle de la nièce de Chopin qui assista avec sa mère au dernier moment du grand musicien nous apprend la vérité sur tout cela[1]. Le sceptique Niecks eut bien raison de critiquer à outrance toutes ces légendes si aimées du public et des biographes. Hâtons-nous seulement de répéter que Niecks met souvent en doute ou conteste ironiquement telle expression ou telle ligne des lettres de George Sand, qui ne méritent aucunement d’être traitées de la sorte[2]. Pour répondre à un autre reproche si souvent prodigué à George Sand par Niecks comme par tant d’autres — voire : que le fait qu’entre 1837 et 1847 le nom de Chopin se trouve trop rarement sous sa plume servait peu à son avantage et qu’il prouverait à lui seul quelle place minime occupait Chopin dans sa vie morale, — pour répondre à ce reproche, nous devons, dès à présent, dire et redire[3], que presque toutes les lettres du volume II de la Correspondance sont tronquées et changées, et avant tout sont tronquées et omises des lignes et des pages entières consacrées à Chopin, des lignes et des pages témoignant du profond attachement de George Sand pour son ami, de sa tendre sollicitude pour lui, pour son train de vie, pour son confort, témoignant aussi de son admiration exaltée pour son âme, sa bonté, et de l’intimité morale toute familiale de leur vie durant ces dix années. Maurice Sand, en biffant ainsi tous ces passages de la Correspondance de George Sand, — par antipathie personnelle pour Chopin, — rendit mauvais service à la mémoire de sa mère : il permit à beaucoup de ses ennemis de profiter de cette absence presque complète du nom même de Chopin dans la Correspondance de George Sand comme d’une preuve du manque de toute tendresse, de tout attachement sérieux de sa part pour le grand musicien. Nous noterons, au cours de notre récit,

  1. Voir Ferd. Hœsick, Chopin, zycie i tworzosc, p. xix-xxiii.
  2. Cf. George Sand, sa vie et ses œuvres, t. Ier, chap. Ier, p. 56-58.
  3. Cf. George Sand, etc., t. Ier, p. 264.