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comme la garde-malade d’Albert, quand il était indisposé : la cerise de Monsieur), cette année donc mes crises sont rares, malgré le dur hiver. Je n’ai pas encore vu Mme Ryszczewska. Mme Delphine Potocka, que j’aime énormément, vous le savez, devait venir avec elle, mais elle est partie pour Nice, il y a quelques jours. Avant son départ j’ai joué chez moi, pour elle, ma sonate avec Franchomme. J’avais aussi le même soir le prince et la princesse Chartoryski et la princesse de Wurtemberg, ainsi que Mme S[and] ; il faisait une agréable chaleur ce soir-là chez moi…

Je vous ai raconté un tas de choses inutiles, mais il y a huit jours de cela. Aujourd’hui me voilà de nouveau seul à Paris. Hier Mme S[and] est partie avec Solange, cette cousine, vous savez, et Luce ; puis trois jours encore se sont écoulés. J’ai déjà reçu hier une lettre de la campagne ; ils sont tous bien portants et gais ; mais ils ont de la pluie, comme nous ici. L’exposition annuelle des tableaux et de la sculpture est ouverte depuis quelques semaines, mais il n’y a rien de très important fait par les maîtres connus ; cependant de nouveaux talents très réels se sont révélés, ce sont : d’abord un sculpteur qui expose depuis deux ans à peine ; il s’appelle Clésinger ; puis le peintre Couture, dont l’immense tableau, représentant un festin à Rome, à l’époque de la décadence, attire l’attention universelle. Retenez bien le nom du sculpteur : je vous en parlerai, je crois, souvent, car il a été présenté à Mme S[and] avant son départ et a fait son buste, ainsi que celui de Solange ; tout le monde les admire énormément ; ils seront sans doute exposés l’année prochaine. Voici la quatrième fois aujourd’hui que je reprends ma lettre ; nous sommes le 15 avril et je ne sais pas si je la terminerai, parce que je dois aller tantôt chez Scheffer, où je pose pour mon portrait et donner cinq leçons… J’envoie à Louise une petite lettre de Mlle de Rozières, mais aucune de Mme S[and], elle se pressait trop à partir. Je viens encore de recevoir des nouvelles de Nohant : on se porte bien et on change de nouveau l’arrangement de la maison ; on aime à changer, à arranger[1]. Luce, qui était partie d’ici avec eux, a été renvoyée dès son arrivée, d’après ce qu’on m’écrit, de sorte qu’il ne reste plus un seul des anciens serviteurs que les

  1. Cette indication de Chopin est parfaitement exacte : à commencer de 1841, on faisait annuellement exécuter à Nohant des constructions, des arrangements et des changements ; on construisait tantôt une serre, tantôt un manège, tantôt un atelier pour Maurice, on arrangeait un théâtre, une bibliothèque ou la chambre de Chopin, on changeait la destination des chambres, les tentures, les rideaux, les arbres fruitiers, les chevaux et… le personnel de la maison. Toutes les lettres inédites de Mme Sand d’automne et d’hiver sont remplies de détails sur ces arrangements et ces reconstructions. Il en fut de même en 1850, 1851, 1857, 1858, etc., etc., jusqu’à 1862.