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extraits, il est indispensable de le confronter avec l’exposition du moment décisif de la lutte entre le héros et l’héroïne de la Lucrezia Floriani. Nous devons noter que ce roman commença à paraître dans le Courrier français le 25 juin 1846 et fut terminé la même année. Donc l’épisode réel décrit dans le chapitre xxix du roman et dans l’Histoire de ma vie, avait dû avoir lieu avant que la fin du manuscrit fût envoyée à l’impression, c’est-à-dire au commencement de l’été. Nous avons même tout lieu de croire que le fait réel se rapporte à la veille de l’anniversaire de Maurice, c’est-à-dire le 29 juin

Nous osons réfuter absolument et catégoriquement l’assertion de George Sand de n’avoir nullement tracé le caractère de Chopin dans la personne du prince Karol et que ceux qui le croient « se fourvoient de bonne foi ». Ce sont les auteurs, souvent de très bonne foi, qui se fourvoient par rapport à leurs œuvres, à leur signification, leur valeur, leurs défauts et leurs qualités. Et puis « qui s’excuse, s’accuse ».

Il est certain que George Sand n’avait point décrit dans la Lucrezia Floriani son roman vécu avec Chopin, ni ses propres actes, ni les raisons qui, en réalité, amenèrent la discorde, le refroidissement et la rupture. Ils se « fourvoient » donc effectivement ceux qui cherchaient et qui cherchent dans ce roman des faits réellement arrivés. Ceux qui croient et écrivent que ce roman fut l’une des causes de la rupture entre George Sand et Chopin, s’abusent plus encore : Lucrezia Floriani, c’est la conclusion, c’est la réflexion qui suit tout conflit sentimental, tout roman vécu, lorsque tout devient clair, lorsqu’il n’y a plus rien de cette brume rosée ou bleuâtre qui enveloppe tout de son voile enchanteur, et que les rêves poétiques cèdent la place à la critique sobre, prosaïque et pleine de raison. Est-ce sciemment ou inconsciemment que George Sand prit pour objet de son analyse le caractère de Chopin ou plutôt un caractère semblable à celui de Chopin ? Il importe peu, le fait est là. Le nier, c’est nier l’impression du lecteur qui n’a point à juger les intentions de l’auteur, mais son œuvre. Celui qui a attentivement suivi notre récit de la vie de George Sand, pourra moins