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des termes les plus touchants, le roman de Jeanne et qu’elle appelait son « ange », ne furent que l’expression d’une tension de nerfs et d’une irritation, qui s’étaient accrues après une longue suite de désagréments et de chagrins d’un tout autre ordre.

En automne, on entreprit de nouveau une série d’excursions. On alla à Châteauroux reconduire Delacroix et rencontrer Emmanuel Arago ; on visita les bords de la Creuse. Puis on s’amusa à arranger à Nohant des tableaux vivants, à se costumer, à jouer des charades et de petits ballets improvisés Ceux-là prirent peu à peu le caractère de vraies pièces de théâtre improvisées, dans le genre de la commedia dell’arte et furent l’origine de ce théâtre de Nohant, qui tint une si grande place dans l’œuvre de George Sand. Elle-même raconte ainsi comment ces petits ballets prirent naissance, dans son article sur les Marionnettes de Nohant, qui fait partie de ses Dernières Pages :

… Le tout avait commencé par la pantomime, et ceci avait été de l’invention de Chopin ; il tenait le piano et improvisait, tandis que les jeunes gens mimaient des scènes et dansaient des ballets comiques. Je vous laisse à penser si ces improvisations admirables ou charmantes montaient la tête et déliaient les jambes de nos exécutants. Il les conduisait à sa guise et les faisait passer, selon sa fantaisie, du plaisant au sévère, du burlesque au solennel, du gracieux au passionné. On improvisait des costumes, afin de jouer successivement plusieurs rôles. Dès que l’artiste les voyait paraître, il adaptait merveilleusement son thème et son accent à leur caractère. Ceci se renouvela durant trois soirées et puis le maître partant pour Paris, nous laissa tout excités, tout exaltés et décidés de ne pas laisser perdre l’étincelle qui nous avait électrisés…

On faisait prendre part à ces pantomimes, généralement exécutées par Solange, Augustine, Maurice et Lambert, les hôtes séjournant à Nohant, tels que Louis Blanc et Emmanuel Arago. Ce dernier fut tellement entraîné par ce courant de gaieté que toutes ses lettres écrites après son départ de Nohant sont pleines d’allègres souvenus et d’allusions drolatiques, adressées à la reine et la saltimbanque, ainsi qu’aux autres personnages de ces charades en actions. Ce séjour d’Arago à Nohant, en 1846, trouva son écho dans la dédicace du roman de Piccinnino, que