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tout qu’elle appartenait par son éducation, ses relations et son entourage aux couches sociales les moins cultivées. L’une de ses cousines, Adèle Brault, une fille entretenue, s’était mariée avec un artisan. Sophie l’avait toujours secourue, mais il était défendu à la petite Aurore Dupin, par son aïeule, de jamais frayer avec elle même chez sa mère ; elle ne la revit qu’au chevet de mort de cette dernière. Adèle Brault avait une fille, Augustine. Cette jeune fille fréquenta souvent la maison de Mme Sand, dès son installation rue Pigalle : elle prenait part aux ébats de la jeunesse et se trouva être une charmante personne, attirant tous les cœurs par son caractère doux et égal, son enjouement et sa simplicité. Elle devint bientôt la favorite de toute la jeunesse et de Mme Sand. Cette dernière la prit souvent chez elle, à Paris, aussi bien qu’à Nohant[1], parce qu’Augustine avait ce qui manquait tant à Solange : une âme candide et aimante, et parce que son existence dans sa famille était par trop pénible. Sa mère, une femme grossière et inculte, ne pensait qu’à placer sa fille plus ou moins lucrativement, ou bien à tirer bénéfice de ses dons naturels, elle arrivait ainsi à commettre des actes sinon criminels, du moins parfaitement préjudiciables[2]. Augustine aimait la musique et travaillait sérieusement et consciencieusement, espérant plus tard gagner sa vie, soit en donnant des leçons, soit en se vouant à la carrière artistique. George Sand vit bientôt qu’Augustine n’avait ni le talent ni la santé nécessaires pour aborder le théâtre, mais elle lui donna de bons maîtres de musique pour la préparer à donner des leçons de piano. Puis voyant la triste existence d’Augustine et voulant la soustraire aux manèges indignes de sa mère, Mme Sand offrit de la prendre tout à fait chez elle comme fille adoptive. Mme Brault n’accepta pas tout de suite : comme toutes les personnes de son

  1. C’est ainsi, par exemple, que dans l’une de ses lettres de 1844 à Louise Jedrzeiewicz Chopin lui fait part qu’immédiatement après son départ de Nohant son appartement fut occupé par la « cousine » et par sa mère, ce qui lui déplut fort évidemment. (V. le livre de Karlowicz, p. 9.)
  2. Nous empruntons tous les détails concernant Augustine et son histoire à la lettre médite de Mme Sand, adressée par elle en juillet 1848 à M. Chaix d’Estange, et nous les atténuons autant que possible.