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J’ai dîné hier chez Franchomme, je ne suis sorti qu’à quatre heures à cause du mauvais temps et j’ai été le soir chez Mme Marliani. Je dînerai aujourd’hui chez elle avec Leroux, m’a-t-elle dit, si la séance du procès de son frère qui doit être plaidé aujourd’hui finit de bonne heure[1]. J’ai trouvé les Marliani assez bien portants, sauf le rhume. Je n’ai vu ni Grzym. ni Pleyel, c’était dimanche. Je compte aller aujourd’hui les voir, si la neige cesse un peu. Soignez-vous, ne vous fatiguez pas trop avec vos paquets. À demain une nouvelle lettre, si vous permettez. Votre toujours plus vieux que jamais, et beaucoup, extrêmement, incroyablement vieux.

Ch…

Et puis voilà !

À vos enfants.

Franchomme a passé la matinée avec moi. Il est bien bon pour moi. Il se met à vos pieds. Je reçois à l’instant une lettre qui me paraît de Delatouche, et je la joins.

Madame George Sand[2],
à la Châtre,
Château de Nohant (Indre).
Jeudi, 3 heures[3].

Je viens de recevoir votre excellentissime lettre, et je vous vois toute tracassée par vos retards. Mais par pitié pour vos amis, prenez patience, car vraiment, nous serions tous peines de vous savoir en chemin par ce temps-là et pas en parfaite santé. Je voudrais que vous n’ayez des places que le plus tard possible, afin qu’il fasse moins froid, ici c’est fabuleux, tout le monde prétend que l’hiver s’annonce beaucoup trop brusquement. Tout le monde, c’est M. Durand et Franchomme, que j’ai vu déjà ce matin, et chez lequel j’ai dîné hier au coin du feu dans ma grosse redingote et à côté de son gros garçon. Il était rose, frais, chaud et jambes nues. J’étais jaune, fané, froid et trois flanelles sous le pantalon. Je lui ai promis du chocolat de votre part. Vous et le chocolat, c’est synonyme maintenant pour lui. Je crois que vos cheveux qu’il racontait être si noirs sont devenus dans son souvenir couleur chocolat. Il est drôle tout plein, et je l’aime tout particulièrement. Je me suis couché à dix heures et demie. Mais j’ai dormi moins fort que la nuit après le chemin de fer.

  1. Cf. avec ce qui a été dit dans le chapitre m. Le procès d’Achille Leroux avait été plaidé au commencement de décembre 1844.
  2. Inédite.
  3. 5 décembre 1844. (W. K.)