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donné dans le chapitre iv les raisons qui nous font croire qu’elle fut écrite le 26 novembre 1843)[1], elle écrit :

Non, mon pauvre Mauricaud, je ne veux plus rester plus longtemps. La campagne est bella invan. J’ai plus soif de toi et de Chopinet[2] que de tout le reste, et je ne pourrais tenir une seconde fois à l’inquiétude de vous savoir tous deux malades en même temps.

George Sand avait raison de s’inquiéter de Chopin : infiniment préoccupé de son repos moral à elle, il ne voulait point lui donner de soucis et tâchait toujours de lui cacher ses maladies. Mme Sand dut à plusieurs reprises écrire à Mlle de Rozières, à. Mme Marliani, ou à Maurice, afin de les prier de lui dire la vérité, parce qu’elle était tourmentée par des pressentiments. Dans la lettre imprimée du 17 novembre (que nous avons déjà citée à propos de Fanchette) où Mme Sand parle des travaux faits au jardin et dans la maison, et où elle déclare ne plus songer qu’à partir au plus vite, nous lisons les mots[3] :

Dis-moi si Chopin n’est pas malade ; ses lettres sont courtes et tristes. Soigne-le, s’il est plus souffrant. Remplace-moi un peu. Lui me remplacerait avec tant de zèle auprès de toi, si tu étais malade[4].

Mme Sand n’avait pas été trompée par ses pressentiments. Chopin était tombé malade dès son arrivée à Paris. Elle écrit à son fils en novembre 1843 :

J’étais bien sûre que Chopin était malade, je l’avais si bien deviné que j’étais au moment d’aller à Paris, profitant de l’occasion du retour de François, sauf à revenir ici pour faire mon bail. Ainsi voilà mon pauvre petit toussant, crachant, dormant mal ou ne dormant pas, et tout cela sans que je sois là pour le consoler et le dorloter, je vois

  1. Voir plus haut, p. 382-85.
  2. Mots omis dans la Correspondance imprimée.
  3. Corresp., t. II, p. 280.
  4. Dans une lettre à sa sœur, écrite l’aimée suivante, Chopin dit en passant que « l’amabilité n’étant pas dans la nature de Maurice », il n’y a donc pas à s’étonner qu’il ne dise rien à M. Jedrzeiewicz à propos de « sa machine à cigares » (que M. Jedrzeiewicz doit lui avoir donnée), et dans les lettres de Mme Sand à son fils, datées de cette époque et aussi des années ultérieures (surtout dans une lettre de 1851), on sent que Mme Sand se rendait parfaitement bien compte de l’égoïsme de Maurice et de son incapacité de penser aux autres, malgré sa grande bonté et toutes ses autres qualités.