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absent en 1844, y prenait part aussi. On peut même dire que Mme Sand les organisait surtout et avant tout pour le distraire de son méticuleux et douloureux labeur. Ses créations qui naissaient avec la facilité merveilleuse et la spontanéité inconsciente du génie, étaient soumises ensuite à mille changements, à une critique sans merci ; des doutes lui venaient, torturants et cuisants, il refaisait son œuvre de fond en comble ; bref, toujours mécontent de lui-même, il travaillait jusqu’à se rendre complètement malade. C’est alors que Mme Sand qui, par la nature même de sa propre production spontanée et facile, était incapable de comprendre ce travail opiniâtre d’un artiste avide de perfection et ne pouvait que plaindre l’homme, s’empressait de l’entraîner à quelque excursion. On côtoyait les bords de la Creuse, de la Vauvre ou de la Sédelle, on visitait les dolmens dans les environs de Tulle (décrits dans Jeanne), la forteresse de Crozant ou le village de Fresselines, au confluent des deux Creuses (théâtre de quelques scènes du Péché de M. Antoine) ; on allait dans les environs de Saint-Sévère pour voir les champs de bataille des Anglais du temps de Jeanne d’Arc, ou bien au château de Boussac pour admirer les tapisseries historiques, datant du quinzième siècle[1]. Nous trouvons, tant dans l’Histoire de ma vie que dans les lettres imprimées et inédites de Mme Sand, le compte rendu de ces courses. Elles lui donnèrent, de plus, la matière de plusieurs de ses articles[2].

J’avais eu longtemps l’influence de le faire consentir à se fier à ce premier jet de l’inspiration. Mais quand il n’était plus disposé à me croire, il me reprochait doucement de l’avoir gâté et de n’être pas

  1. L’article de Mme Sand consacré à ses tapisseries (dont la confection est attribuée à l’esclave de Zizime, fils de Mahomet II, qui fut fait prisonnier et amené en France par Pierre d’Aubusson, grand maître de l’ordre de Saint-Jean et châtelain de Boussac), cet article parut en 1847 dans V Illustration et fut réimprimé dans le volume Promenades autour d’un village. Ces tapisseries sont aujourd’hui au Musée de Cluny.
  2. Tels sont : la Vallée noire ; le Cercle hippique de Mézières en Brenne ; les Tapisseries du château de Boussac ; la Berthenoud ; les Bords de la Creuse ; Un coin de la Marche et du Berry, etc.