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que vous êtes le meilleur médecin qu’il ait jamais eu, puisqu’il suffit de lui parler de vous, pour lui rendre l’amour de la vie. Et vous, ma chérie bonne, comment s’est passé ce long voyage ? Malgré toutes les distractions que votre mari s’imaginait de vous y faire trouver, je suis sûre que vous n’aurez eu de consolation véritable qu’en retrouvant vos enfants, votre mère et votre sœur. Goûtez donc ce bonheur profond de presser dans vos bras les objets sacrés de votre tendresse et consolez-les d’avoir été privés de vous, en leur disant tout le bien que vous avez fait à Frédéric. Dites-leur à tous que je les aime aussi et donnerais ma vie pour les réunir tous avec lui un jour sous mon toit. Dites-leur comme je vous aime, ils le comprendront mieux que vous qui ne savez peut-être pas tout ce que vous valez. Je vous embrasse de toute mon âme, ainsi que le mari et les enfants.

La lettre inédite suivante à Mme Marliani est comme un commentaire et un complément à la première de ces deux lettres de Mme Sand à Louise Jedrzeiewicz ; nous en avons déjà cité plus haut quelques lignes se rapportant à l’influence bienfaisante de cette dernière sur son frère.


Nohant, fin septembre 1844.

Chère amie, je ne vous dirai pas tous mes regrets d’avoir été si longtemps privée de vous écrire, j’aurai plutôt fait de vous raconter tous mes empêchements. Tout le mois dernier, j’ai été à la tâche depuis dix heures du soir jusqu’à six et sept heures du matin pour faire mon nouveau roman qui a été enfin terminé vers le 28. Aussitôt après, Chopin ayant été encore à Paris reconduire sa sœur et son beau-frère, je suis allée courir, pour me remettre le corps et l’esprit, dans nos petites montagnes de la Marche avec Leroux, qui venait d’arriver de Boussac à l’instant même, Solange et mon frère. Nous avons couru par des chemins perdus et des hameaux aussi sauvages qu’on pourrait les désirer dans un voyage autour du monde. Nous avions montré au gros Manuel les roses de notre pays et encore il n’était pas trop enchanté.

Et Chopin, grâce à sa sœur, qui est bien plus avancée que lui, est maintenant revenu de tous ses préjugés. C’est une conversion notable dont il ne s’est pas aperçu lui-même. Ainsi au milieu des fatigues et des soucis, il arrive toujours quelque chose d’heureux et de réconfortant.. De semblables excursions avaient été faites également par Mme Sand dans les années précédentes et suivantes ; Chopin,