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rait pas fait pour consoler son pauvre cher Fritz, pour préserver sa frêle santé contre la trop dure épreuve. Son cœur aimant comprenait combien la mère et les sœurs de son ami devaient s’inquiéter à son sujet, elle écrivit à la mère de Frédéric la lettre que voici[1] :


Paris, le 29 mai 1844.
Madame,

Je ne crois pas pouvoir offrir d’autre consolation à l’excellente mère de mon cher Frédéric, que l’assurance du courage et de la résignation # le cet admirable enfant. Vous savez si sa douleur est profonde et si son âme est accablée ; mais, grâce à Dieu, il n’est pas malade, et nous partons dans quelques heures pour la campagne, où il se reposera d’une si terrible crise.

Il ne pense qu’à vous, à ses sœurs, à tous les siens, qu’il chérit si ardemment et dont l’affliction l’inquiète et le préoccupe autant que la sienne propre.

Du moins, ne soyez pas de votre côté inquiète de sa situation extérieure. Je ne peux pas lui ôter cette peine si profonde, si légitime et si durable, mais je puis du moins soigner sa santé et l’entourer d’autant d’affection et de précaution que vous le feriez vous-même. C’est un devoir bien doux que je me suis imposé avec bonheur et auquel je ne manquerai jamais.

Je vous le promets, madame, et j’espère que vous avez confiance en mon dévouement pour lui. Je ne vous dis pas que votre malheur m’a frappée autant que si j’avais connu l’homme admirable que vous pleurez. Ma sympathie, quelque vraie qu’elle soit, ne peut adoucir ce coup terrible, mais en vous disant que je consacrerai mes jours à son fils et que je le regarde comme le mien propre, je sais que je puis vous donner de ce côté-là quelque tranquillité d’esprit. C’est pourquoi j’ai pris la liberté de vous écrire, pour vous dire que je vous suis profondément dévouée, comme à la mère adorée de mon plus cher ami.

George Sand.

Cette lettre dut tranquilliser la famille de Chopin. Sa mère lui écrivit qu’elle voudrait bien être auprès de lui et le soigner,

  1. Nous empruntons cette lettre (déjà publiée précédemment dans le livre de M. Karasowski (Fryderik Chopin, zycie, Usty, diela, t. II, p. 158-159) au livre de Fr. Niecks, Fr. Chopin, t. II, p. 365, Appendice I.