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journal provincial » et à la pensée que tous les amis mondains de Chopin étant très arriérés en matière de politique, leurs opinions influençaient le grand musicien. Tout cela la peinait, d’autant plus que si elle et Chopin étaient peu d’accord sur les questions pratiques, ils appréciaient leur mutuel génie : ils avaient la même compréhension générale de l’art, la même sensibilité ; leurs natures artistiques aspiraient de façon constante ver^s les choses les plus sublimes. Et si Mme Sand écrivit à propos de la visite de la sœur de Chopin à Nohant en 1844 : « Chopin, grâce à sa sœur qui est bien plus avancée que lui, est maintenant revenu de tous ses préjugés. C’est une conversion notable dont il ne s’est pas aperçu lui-même…[1] », d’autre part, dans une quantité d’autres lettres, elle parle avec enthousiasme des « chefs-d’œuvre que Chopin emporte avec lui à Paris », de ce que « de nouveau il compose des merveilles », elle parle de sa « bonté angélique », de la « pureté tout enfantine de son âme », etc. Et Chopin, de son côté, lui écrit que « tout ce qu’elle fait est grand et beau ». La lettre où se trouvent ces mots étant inédite, nous sommes heureux de pouvoir citer ici ces lignes de l’immortel artiste, absolument inconnues :

Sans date. Vendredi[2].

Voici ce que Maurice vous écrit. Nous avons reçu de vos bonnes nouvelles et nous sommes heureux que vous soyez contente. Tout ce que vous faites doit être grand et beau, et si on ne vous écrit pas sur ce que vous faites, ce n’est pas parce que cela nous intéresse peu. Maurice vous a envoyé sa boîte hier soir. Écrivez-nous, écrivez-nous ! À demain. Pensez à vos vieux.

Ch…
À Sol

Maurice va bien et moi aussi.

  1. Lettre inédite à Mme Marliani, de septembre 1844.
  2. Cette lettre est non datée, mais elle doit avoir été écrite en l’automne de 1843, lorsque Mme Sand dut rester à Nohant jusqu’à la fin de novembre pour régler des questions matérielles et financières (v. plus haut, chap. iv), tandis que Chopin et Maurice se trouvaient déjà à Paris ; ce fut le moment où se jouait le dernier acte de l’histoire de Fanchette. Il se peut toutefois que la lettre ait été écrite en l’automne de 1844, ou même de 1845.