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dignation contre cette « intrigante accomplie », cette indiscrète demoiselle de Rozières caquetant, profitant grossièrement et sournoisement de ses relations actuelles avec « l’ami Antoine » et des relations d’antan du même Antoine avec Chopin, pour s’insinuer dans l’intimité de George Sand. Il éprouvait encore du dépit contre lui-même, d’avoir présenté cette femme à Mme Sand. Puis il avait du dégoût pour toutes ces grandes phrases, ces grandes inconvenances, tous ces manques à la bienséance, cette ostentation de Mlle de Rozières de partir à grand fracas à la suite d’Antoine ; et du mépris pour l’acharnement de cette vieille fille amoureuse à poursuivre son cher ami d’enfance, à se cramponner « à cet honnête, mais apathique et faible Antek ». Il y avait surtout l’indignation d’un homme de goût pour toutes ces déclamations contre « le monde hypocrite » et les « horribles convenances ». Il y avait enfin du chagrin à constater que Mme Sand prêtait la main à toute cette histoire, croyant, dans son idéalisme, que c’était là la preuve d’un « grand amour », d’une abnégation, et « d’un sacrifice » dignes de toute sympathie.

Comment s’étonner que le pauvre Frédéric souffrît et boudât silencieusement pendant des journées entières, qu’il cachât les causes de son mécontentement et qu’il redoutât l’arrivée de Mlle de Rozières à Nohant.

George Sand, elle, s’étonnait que, sans aucune raison apparente, subitement, Chopin se mît à détester son ex-élève, sans qu’il lui fût possible d’expliquer pourquoi. Et au lieu d’arranger les choses en parlant de tout cela délicatement, entre quatre yeux, George Sand écrivit et raconta le fait à cette même Mlle de Rozières, et Maurice porta la mesure au comble en déclarant « d’un ton très sec, » que cette demoiselle était « excellente ». Quant à cette dernière, il est bien certain qu’elle était incapable d’apprécier l’excessive confiance et l’amitié de Mme Sand. Chopin par contre avait bien raison de se défier d’elle et de l’appeler « indiscrète ». Voici ce que cette demoiselle racontait à ce même Antek, l’objet de son adoration, dans les deux lettres que le comte Wodzinski publia dans son livre : Les trois romans de