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coupables », et le 13 septembre, « rendit une ordonnance de non-lieu ».

Cependant, toujours grâce aux recherches de Delaveau, Fanchette se retrouva, le 18 août, dans la petite ville de Riom (Puy-de-Dôme), où on l’arrêta comme « se livrant à la mendicité », parmi des bateleurs ou des bohémiens. Pour étouffer l’affaire, on s’empressa de ramener à la Châtre la malheureuse enfant privée de raison et incapable de dire un mot ; on la ramena à pied, de brigade en brigade, en compagnie de vagabonds, de voleurs et d’assassins. Lorsqu’elle fut enfin « réintégrée provisoirement à l’hospice », il se trouva qu’elle était déshonorée, malade et enceinte. Le procureur s’obstinait pourtant à se tenir coi et les autorités espéraient voir bientôt tomber dans l’oubli cette « désagréable histoire », lorsque tout d’un coup retentit la voix du grand écrivain du Berry. Le 25 octobre 1843, George Sand raconta cette criminelle histoire dans les colonnes de la Revue indépendante, en y publiant une prétendue Lettre de Blaise Bonnin[1] à Claude Germain, écrite en langue populaire, mais suivie d’une Communication au rédacteur en chef de la Revue indépendante, signée de son nom en toutes lettres.

L’impression que l’article produisit fut foudroyante. Les coupables, et surtout le procureur du roi à la Châtre, M. Rochoux, crièrent haro et s’empressèrent de dire que tout cela était faux ou plutôt que c’était d’un bout à l’autre un « roman » écrit par un auteur habitué à créer des œuvres d’imagination. M. Rochoux le déclarait carrément dans sa Lettre au directeur de la Revue indépendante, datée du 9 novembre 1843[2].

Ah ! dit alors George Sand, c’est donc un « roman », une œuvre « d’imagination » ! Eh bien, veuillez lire l’ « œuvre romanesque » du commissaire de police, intitulée « l’enquête » ! et « ne vous faites pas l’éditeur responsable du roman invraisem-

  1. Nous avons vu que c’est de ce même nom, mais précédé du prénom de Gustave, que George Sand avait signé ses Dialogues familiers sur la poésie des prolétaires et sur les poètes populaires.
  2. C’est une simple erreur d’impression que la date de « 9 novembre 1845 » qu’on lit dans l’édition des Œuvres complètes de George Sand. (V. le volume des Légendes rustiques, p. 214.)