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daignez me remercier. Mais je crois que vous devez trouver bien naturelle et bien simple mon admiration pour vous, et que vous ne pouvez pas me savoir un gré infini de ce que j’ai des yeux pour voir la lumière et une langue pour dire qu’il n’y a rien de plus beau dans la nature que la lumière. Je sais bien qu’il y a dans ce temps-ci des esprits, bizarres qui, pour faire du neuf, ont dit que le règne du beau devait faire place au règne du laid ; mais les plus excentriques même n’ont pas, que je sache, trouvé dans leur fanatisme de nouveautés le courage d’oser vous nier et vous méconnaître. Ainsi, ne me sachez, je vous prie, aucun gré de n’être pas absurde ; je le suis peut-être assez sous d’autres rapports. J’ai reçu ce matin une lettre de Poncy qui me charge d’accompagner l’offrande de son volume d’un billet pour vous. J’ai devancé son inutile recommandation en vous envoyant le livre. Mais voici après coup la lettre que je sais bien sincère et partie du meilleur de son âme.

Croyez bien, monsieur, que Poncy n’est pas le seul à vous appeler son maître bien-aimé, et, si je ne craignais pas de paraître moins naïve que lui, je vous dirais aussi ce que je pense sur la place que vous avez dans les plus grandes admirations de ma vie. George Sand.

Outre la préface du Chantier, Mme Sand écrivit, comme nous l’avons dit, encore la préface du troisième recueil de Poncy, la Chanson de chaque métier, paru en 1850, et enfin celle de son quatrième recueil, Bouquet de marguerites, publié en 1852. Elle contribua ainsi à la célébrité de son jeune protégé.

Voici, maintenant, à côté de Poncy, un autre poète prolétaire, le vieux père Magu : âme naïve et pure, esprit sain, vif et aimable. C’est un simple tisserand de village, il sait à peine lire, mais c’est un poète de par la grâce de Dieu, un poète qui se mit à faire ses vers comme les oiseaux se mettent à chanter. Il chanta dans ses premières poésies son amour, simple et frais comme une idylle, pour sa cousine (plus tard « la mère Magu » avec quatorze enfants) une modeste et charmante villageoise, naïve comme lui, qui

        … Distinguait bien un œillet d’une rose
        Mais ne démêlait point les vers d’avec la prose.

et qui devint toutefois un fidèle camarade, et même littérairement une bonne conseillère de son mari. Épouse et mère excel-