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moins de succès en littérature que de talent et de besoins, il a pris le parti d’achever courageusement son droit ; et maintenant il travaille à se faire une clientèle dans sa province, dont il sera bientôt, j’espère, l’orateur le plus brillant… (tout comme Emmanuel Arago).

Au cours de notre récit nous avons maintes fois signalé certains traits du caractère et de l’existence d’Horace qui rappelaient tantôt l’un, tantôt l’autre des commensaux de George Sand, petits bourgeois et intellectuels faisant leur chemin soit dans la littérature, soit au barreau, soit à la tribune. Nous avons cité la lettre d’Emmanuel Arago qui prouve que plusieurs contemporains avaient cru le reconnaître dans le héros de ce roman. Dans sa Dédicace à Charles Duvernet et dans la préface, écrite pour l’édition de 1855, George Sand dit que ce roman lui fit beaucoup d’ennemis, un grand nombre de gens ayant cru se reconnaître dans le personnage d’Horace ; elle assure qu’elle et Duvernet l’avaient « certainement connu, mais disséminé entre dix ou douze exemplaires », parce que les traits typiques d’Horace se rencontrent chez beaucoup de personnes, et que le trait qui leur est commun à toutes est la personnalité. Donc, tout en niant avoir peint un portrait spécial, George Sand convenait que ce portrait ressemblait à beaucoup d’individus qu’elle avait connus. Cette ressemblance frappa les lecteurs contemporains et surtout les amis berrichons de la romancière.

Rappelons que deux ans auparavant avait paru un recueil de nouvelles, les Revenants, par Sandeau et Houssaye ; parmi elles il y en avait une intitulée aussi Horace. C’était un épisode détaché de Rose et Blanche, ce premier roman fait par George Sand en collaboration avec Jules Sandeau. Le héros était le prototype de tous les héros négatifs des futurs romans de Mme Sand : un hâbleur égoïste, imposant aux autres son froid enthousiasme, mais aussi incapable d’un sentiment absolu que d’une activité décidée. Rappelons aussi que c’est en 1839 que parut le roman de Sandeau, Marianna, — une sorte d’Indiana refaite par Sandeau, c’est-à-dire la peinture des premiers orages romanesques de la vie de George Sand. Nous présumons