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maternelle. Voilà ce que l’auteur d’Horace ne pardonne également pas à sa vicomtesse, qui oublie complètement ses enfants et les abandonne aux soins de sa belle-mère. C’est là un de ces « signalements spéciaux » mentionnés plus haut. Nous en trouvons un autre encore. Après un gai souper, copieusement arrosé, une certaine personne assez peu respectable, surnommée « la Proserpine », adresse à Horace à propos de la vicomtesse de Chailly la phrase qu’elle semble avoir lue dans le Journal de Piffoël : « Votre vicomtesse est sèche, reluisante et anguleuse comme un coquillage (!). »

Il est très curieux de noter que Balzac et Heine s’expriment sur le compte de Mme d’Agoult en des termes qu’on dirait copiés tantôt sur le Journal de Piffoël et tantôt sur le texte d’Horace. Ainsi par exemple Balzac écrit à Mme Hanska[1] que lors de l’impression de Béatrix il avait dû enlever quelques bons mots « de Camille Maupin sur les os de Béatrix… ». Or Balzac avait peint George Sand sous les traits de « Camille Maupin » ou « Mlle de Touches », et Béatrix, l’héroïne du roman de ce nom, est la comtesse d’Agoult[2].

Balzac écrit encore à la même[3] :

Marie d’A… est un effroyable animal du désert (tel est le mot des rats de l’Opéra pour désigner ces espèces de femmes). Liszt est très heureux d’en être quitte. Elle est devenue journaliste avec G… Elle se donne, comme la princesse Belgiojoso, le genre d’abandonner ses enfants. Elle m’a fait des coquetteries, m’a invité à dîner, j’y ai dîné deux fois, une avec Ingres, l’autre avec Hugo. Elle est prétentieuse à ne pas enfin être supportée deux heures. J’ai fui pour toujours…

Le lendemain, Balzac écrit encore à la même :

Elle écrit énormément dans la Presse sous le nom de Daniel Stem. C’est la petite-fille des Bethmann de Hambourg ou de Francfort, et elle fait la grande dame comme son frère, M. de Flavigny, fait le diplomate. Elle est Tourangelle. J’ai trouvé assez fat à elle de se reconnaître dans Béatrix…[4].

  1. Lettres à l’Étrangère, t. Ier, p. 514.
  2. Cf. George Sand, sa vie et ses œuvres, t. II, p. 369-370.
  3. Lettres à l’Étrangère, t. II, p. 160 : lettre du 15 mai 1843.
  4. Lettre du 16 mai 1843. Lettre à l’Étrangère, t. II, p. 164.