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en rapport illimité et continu avec l’univers. Tout ce qui tend à l’assujettir, à l’asservir à des limites bornées est le mal. L’homme ne peut pas vivre sans société, sans famille, sans propriété ; mais la société — lorsqu’elle l’enchaîne par des préjugés de caste, la famille, — lorsqu’elle usurpe toute son activité à son seul profit, la propriété, — lorsqu’elle l’empêche de remplir librement sa vraie destination qui est de progresser infiniment, engendrent le mal, et c’est ce qu’il faut combattre. Tout le mal sur la terre ne provient que des obligations mal comprises que nous imposent ces trois institutions qui doivent par leur nature ne servir qu’au bonheur de l’humanité. Il faut donc combattre les abus de ces institutions et non les institutions mêmes, et il ne faut combattre que ces abus, alors seulement l’humanité progressera.

4) Le progrès de l’humanité est infini et continu. Le progrès de l’humanité est le résultat des efforts, des victoires et des labeurs réunis de tous les éléments qui la composent, donc chaque homme doit travailler dans la mesure de ses forces et de ses capacités et développer chacune de ses capacités jusqu’au terme du possible. C’est ainsi qu’il sera non seulement un membre digne et utile de la société, non seulement ses enfants de par la loi des affinités seront aussi des hommes excellents, développés, d’une grande élévation morale, mais encore lorsque cet homme renaîtra dans l’humanité pour recommencer une nouvelle existence, il sera meilleur, supérieur d’un degré à sa première existence, donc il sera un membre encore plus utile d’une nouvelle société, meilleure aussi que la première. C’est ainsi qu’en s’élevant lui-même, il élève en lui l’humanité. C’est pour cela que chaque homme, en progressant, en tendant vers la perfection, remplit son devoir envers lui-même et envers l’humanité entière.

Il faut convenir que Leroux sut, avec une déduction admirable, avec une profondeur et une ampleur de jugement historique souvent géniales, poursuivre dans ses articles et dans ses essais cette doctrine du progrès continu, dont le vrai auteur fut au fond Leibniz. Il sut, par une argumentation probante et remarquable, suivre et exposer le développement des grandes idées, il montra comment, tout en changeant parfois d’aspect,