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Je ne pense pas vous blesser, madame, lui écrit-il le 16 août 1840, de Toulon[1], en vous disant la vérité ; je parle souvent de vous, j’ai dit à des amis comment j’ai pu entreprendre un si long voyage ; votre action généreuse a exalté des transports d’enthousiasme et fait couler des larmes de joie. Chacun bénit Mme George Sand et sent qu’il lui devra une bonne partie du bien que j’aurai fait…

Il revient encore sur la bonté et la générosité de Mme Sand dans sa lettre du 19 septembre, etc., etc. Sa femme, en l’absence de son mari, écrit aussi à propos d’une « offre qui peut la rendre heureuse » et dit qu’elle n’hésite plus à l’accepter. (Il paraît que Mme Sand lui donna la possibilité de reprendre auprès d’elle sa petite enfant que la pauvre femme, vivant de son travail, avait dû placer en nourrice. George Sand lui procura du travail et une petite pension.) À ce même moment Agricol Perdiguier, à court d’argent, adresse à Mme Sand la lettre suivante, franche et simple, que Pierre Huguenin aurait probablement dû réprouver :

Bordeaux, 2 septembre 1840.
Madame,

Je ne vous écris aujourd’hui que deux mots, pour vous faire savoir que je suis arrivé à Bordeaux bien portant et épuisé d’argent. D’après la recommandation que vous m’avez faites (sic) tant de lois, je ne me gêne point et vous avoue sans détours ma situation. Je n’attends pas votre réponse ici, mais à Nantes. Un ami me prêtera pour aller jusqu’à cette dernière ville et je m’acquitterai envers lui le plus tôt possible. Je suis encore loin de Paris, j’ai à passer à la Rochelle, à Nantes, à Tours, à Orléans, à Chartres, et dans d’autres villes ; j’ai besoin, ce me semble, d’au moins cent francs, car j’ai un long espace à parcourir. Vous m’adresserez votre lettre chez M. Darnand, rue Saint-Léonard, 20, à Nantes. Je vous remercie de celle que j’ai trouvée à mon arrivée à Bordeaux, vous pouvez compter sur moi et sur tout ce qui en dépend.

  1. Le timbre porte : Toulon, 15 août, mais la lettre est datée à l’intérieur du 16 août. Ce fut une erreur que Perdiguier constata lui-même en disant, dans une de ses lettres suivantes, qu’il s’était trompé, « ayant pris le jour de l’Assomption pour un dimanche… ».