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artistes, surtout lorsqu’elles ont horreur des distractions passagères ») pût « la distraire de ses enfants », mais que « la tendre amitié que lui inspirait Chopin » lui semblait un « moindre danger et même un préservatif contre des émotions qu’elle ne voulait plus connaître » ; qu’enfin elle et Chopin furent ainsi « poussés par la destinée dans les liens d’une longue association », — tout cela nous paraît un essai absolument manqué et fort inutile de donner l’explication d’un fait, qui n’avait pas besoin d’être expliqué, et de lui donner une apparence qui ne pouvait tromper personne.

Ces pages de l’Histoire de ma vie nous sont déplaisantes au plus haut point, car il n’en existe peut-être point d’autres aussi aptes à donner raison aux épithètes favorites de « raisonneuse » et même d’ « hypocrite » que les ennemis de George Sand aiment tant à lui octroyer et qu’elle ne mérite nullement, en général. Nous nous permettons quand même de la disculper en cette occasion, en répétant d’abord ce que nous avons dit dans le tout premier chapitre de ce travail : les tours de phrases « diplomatiques » et les réticences étaient imposés à l’auteur de l’Histoire de ma vie comme à l’auteur des Mémoires de Catherine II par la modestie inhérente et obligatoire à leur sexe. Secondo : la fin de l’Histoire de ma vie s’imprimait à une époque où Maurice Sand était non seulement un adulte, mais frisait la trentaine déjà ; il haïssait Chopin, il était choqué par tout ce qui rappelait les rapports de sa mère et du grand musicien polonais, on peut donc croire que c’était pour être agréable à son fils que Mme Sand émit dans les dernières pages de son œuvre ces considérations inutiles et qui ne peuvent qu’embrouiller le lecteur. Nous ne les critiquerons ni ne les réfuterons point, nous nous bornerons à conseiller à tout lecteur de l’Histoire de ne lire les pages 452-474 qu’armé de ce « lorgnon de critique » — dont parle Pouchkine — et nous nous tournerons maintenant vers la description de la vie et du logement de Mme Sand dans la rue Pigalle, d’autant plus que nous avons sous la main plusieurs lettres et mémoires des personnes qui visitèrent Mme Sand et Chopin pendant les trois années