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répondit de sa guérison et dit qu’avec de grands soins il pourrait vivre longtemps. Il exigea toutefois la prolongation du séjour dans le Midi et conseilla de ne point reprendre la route de Paris avant le commencement de l’été. Mme Sand se donc avec sa famille pour tout le printemps à Marseille.


À Madame Marliani.
Marseille, 26 février 1839.

Enfin ! chère, me voici en France !

… Un mois de plus et nous mourions en Espagne, Chopin et moi ; lui de mélancolie et de dégoût, moi de colère et d’indignation. Ils m’ont blessée dans l’endroit le plus sensible de mon cœur, ils ont percé à coup d’épingles un être souffrant sous mes yeux, jamais je ne leur pardonnerai et si j’écris sur eux, ce sera avec du fiel. Mais [il faut] que je vous donne des nouvelles de mon malade, car je sais, bonne sœur, que vous vous y intéressez autant que moi. Il est beaucoup, beaucoup mieux, il a supporté très bien trente-six heures de roulis et la traversée du golfe de Lion qui, du reste, a été, sauf quelques coups de vent, très heureuse. Il ne crache plus du sang, il dort bien, tousse peu et surtout il est en France ! Il peut dormir dans un lit que l’on ne brûlera pas pour cela. Il ne voit personne se reculer quand il étend la main. Il aura de bons soins et toutes les ressources de la médecine.

Nous avons résolu de passer le mois de mars à Marseille, vu que ce mois est variable et fantasque en tout pays, et que le repos est maintenant la chose la plus désirable pour notre malade. J’espère qu’en avril il sera rétabli et capable d’aller où bon lui semblera, alors je consulterai sa fantaisie et le reconduirai à Paris s’il le désire. Je crois qu’au fond c’est le séjour qu’il aime le mieux. Mais je ne l’y laisserai retourner que bien guéri…[1].

Mme Sand voulut d’abord s’installer avec sa petite famille dans quelque maison de campagne aux environs de Marseille, mais après plusieurs recherches infructueuses et divers déménagements, ils firent choix de l’Hôtel de Beauvau, où Chopin prie ses amis de lui adresser ses lettres, tandis que Mme Sand donne à tous les siens l’adresse du docteur Cauvière : 70, rue

  1. Inédite.