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plus atroce misère morale, dans la solitude et l’abandon absolus.

Ensuite l’auteur évoque une autre histoire, celle des trois sœurs vivant chez leur oncle, curé italien (cette partie des Lettres à Marcie a été reproduite par différents journaux sous le titre de Les trois sœurs). La cadette, Arpalice, s’éprend d’un jeune lord anglais, qui l’aime à son tour. Elle pourrait devenir heureuse, se marier (car l’amour de ce jeune couple finit par vaincre les préjugés de caste et par désarmer les préventions de la mère du jeune lord), mais Arpalice ne veut pas abandonner ses sœurs ; elle renonce volontairement à sa passion et revient à son ancienne vie, soucieuse du bonheur des autres et se vouant tout entière, avec ses deux sœurs, aux œuvres de pitié, afin de servir l’humanité.

Déjà, avant d’avoir commencé l’histoire des trois sœurs, l’auteur ayant devancé ainsi de bien des années les idées émises dans la Sonate à Kreutzer de Tolstoï, disait à Marcie… « Vous êtes instruite, vous êtes pure, voilà de vrais éléments de bonheur, » et lui conseillait d’aspirer à l’indépendance, d’étudier, de se développer intellectuellement, de ne point se marier ou de n’épouser qu’un homme dont elle serait sûre, de n’accepter de croyances, qu’après les avoir soumises à une critique et à une analyse sérieuse et libre.

Mais tout en disant cela, Fauteur se voit obligé de refroidir un peu les élans de Marcie vers une vaste activité, car, dit-il, à présent, il n’y a pas encore pour la femme de champ d’activité, outre l’art et la famille ; les autres professions sont insupportables même pour les hommes, du moins pour ceux qui ont des vues un peu larges et qui ont certaines exigences. (Ici, nous voyons