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contradiction avec le fait qu’un an à peine auparavant, elle avait corrigé et refait Lélia.

Bien que George Sand ne considère elle-même les Lettres à Marcie que comme le prologue d’un vrai roman, nous nous croyons en droit de les analyser comme une œuvre purement théorique, comme l’expression de ses idées sur le mariage, sur l’affranchissement de la femme, sur son égalité avec l’homme, etc., etc.

Nous pouvons nous convaincre par ces Lettres, que depuis Lélia, les idées et les vues générales de George Sand se sont précisées, affirmées, et ont beaucoup mûri. Jadis, c’était une protestation passionnée et poétique. À présent, c’est l’exposition d’une théorie claire et bien définie sur l’égalité des droits de l’homme et de la femme. Aussi, n’y a-t-il rien d’étonnant qu’après les Lettres à Marcie, ainsi qu’après Indiana, Valentine et Jacques, les rétrogrades et les bigots crièrent au renversement de l’institution sacrée du mariage, etc., etc. Lamennais lui-même fut intimidé.

Marcie a vingt-cinq ans ; elle est désabusée de la vie, elle aspire à quelque chose de mieux, ne peut se résigner à une existence mesquine, s’ennuie dans le monde, s’ennuie quand elle n’y est pas, pense même pour quelque temps à s’enfermer dans un cloître (comme Lélia ou comme George Sand elle-même). Marcie rêve au mariage, tout en se révoltant contre ses abus ; elle ne trouve pas de vraie consolation dans la religion, et pourtant, elle a peur d’analyser ses croyances en critique et en philosophe ; elle ne sait même pas si une femme peut oser s’occuper de philosophie. Marcie ne trouve pas dans son entourage un homme qui lui semble digne d’elle ; ses exigences de la vie sont trop grandes ; elles ne ressemblent nullement à celles