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Les Lettres à Marcie, la troisième œuvre de George Sand parue dans le Monde, est certes bien plus importante que les deux articles dont nous venons de parler. Malheureusement, cet ouvrage, on le sait, n’a jamais été terminé et a été interrompu au chapitre VI. Lamennais ne l’a-t-il pas suffisamment lu avant d’en commencer l’impression, en fut-il mécontent plus tard, ou bien encore, des amis lui firent-ils remarquer que les idées prêchées par George Sand différaient trop de ses propres opinions et des tendances du Monde[1] ? C’est ce que nous ne saurions dire. Quoi qu’il en soit, déjà le 28 février, c’est-à-dire après l’apparition du n° 3 avec la suite des Lettres à Marcie, George Sand adressa une lettre à Lamennais pour lui demander ce qu’elle avait à faire. Elle avait évidemment touché à des questions trop hardies qui avaient pu horripiler Lamennais : le mariage, le divorce, l’importance de la passion dans la vie des femmes. Elle n’avait pas su prévoir que son récit la mènerait si loin. Elle aurait voulu obtenir l’approbation du maître, mais elle n’ose pas le consulter sur tous les détails.

« Pourtant, me voilà lancée et j’éprouve le désir d’étendre ce cadre des Lettres à Marcie, tant que je pourrai y faire entrer des questions relatives aux femmes. Je vou-

  1. On pourrait admettre ce dernier cas en lisant dans le livre de M. Napoléon Peyrat sur Bélanger et Lamennais, le passage suivant d’une lettre de Béranger : « Je l’ai répétée (une invitation) aussi à Lamennais, que je voudrais bien retirer du bourbier où d’autres semblent vouloir l’enfoncer. N’en dites mot ; il veut se mettre à la tête d’un journal et je crains d’arriver trop tard pour lui éviter cette folie. Il m’a compris relativement à ses rapports avec Liszt et George Sand. Mais je crains bien que, facile et bon comme il est, il ne tombe de Charybde en Scylla… » Un peu après, pourtant, ce même Béranger, en disant qu’il ne sait pas trop comment Lamennais et son Monde se tireraient d’affaire, ajoute : « À moins que George Sand n’invente quelque chose. »