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sépara de lui (1832). Il n’accepta pas son excommunication, car il envisageait, plus sévèrement encore que les princes de l’Église, sa vocation ecclésiastique. Il avait déjà proclamé auparavant que les serviteurs de l’autel ne doivent pas user des biens terrestres ni recevoir aucun subside du gouvernement, mais vivre dans la pauvreté. C’est ce qui lui avait attiré l’inimitié du haut clergé. Il continua donc à se regarder comme prêtre, à prêcher la fraternité au nom de Dieu, la liberté pour tous, l’amour du prochain. Bien plus encore, il exigeait l’entière observation des préceptes évangéliques, voulant que personne ne se crût maître, ne jugeât ses frères, ne levât les armes contre son frère ; en un mot, il rejeta toutes les institutions politiques qui, selon son opinion, empêchaient le triomphe de l’esprit de la doctrine chrétienne. [Paroles d’un croyant, 1832 ; Le Livre du peuple, 1837 ; Une voix de prison.) Il se rapprocha ainsi du saint-simonisme et des doctrines démocratiques et révolutionnaires des années 1830. (De l’esclavage moderne, 1840 ; Le pays et le gouvernement, 1840 ; Amchaspands et Darvands, 1843) ; mais il s’en éloigna complètement, quant à la question du féminisme. Il était l’ennemi de l’émancipation de la femme, exigeant qu’elle fût soumise à l’homme comme le voulait saint Paul (Discussion critique et pensées diverses, 1841). À tout autre égard, il devança son siècle, prêchant, d’une part, des choses qui sont actuellement conformes aux vues de cette même Église qui l’avait condamné et qu’elle pratique aujourd’hui, telles que le christianisme social de Léon XIII, — et d’autre part, apparaissant en même temps comme un des prédécesseurs de Léon Tolstoï[1]. On trouve, dans les Paroles

  1. Tel le chapitre xxvii (absolument semblable à ce que L. Tolstoï a