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soient le plus souvent loin de ressembler à Aurore Dudevant par leur caractère et leur tempérament.

Les ennemis de George Sand se sont évertués à nous représenter son tempérament à elle sous les plus noires couleurs, tandis qu’on dirait que ses amis et ses biographes, se sont imposés le rôle hypocrite de se taire là-dessus ou de recourir à tous les faux-fuyants pour jeter comme un mystère sur l’un ou l’autre trait de la vie de leur héroïne. Nous aimons à répéter encore ici que nous ne voyons aucun besoin de chercher les circonstances atténuantes dont il semble qu’on ne puisse se passer lorsqu’on parle des amours de notre écrivain. George Sand fut une femme tout exceptionnelle, géniale, à laquelle il serait absurde d’appliquer la mesure de la morale courante, tout comme il serait insensé de l’appliquer à Byron ou à Lermontow. Si en chacun de nous les défauts sont étroitement liés à nos qualités, et si chacun des traits de notre caractère est presque inséparable des autres, ce phénomène est bien plus frappant encore dans les natures fortes, complexes et exceptionnelles.

Avant d’arriver à la douce quiétude objective du philosophe qui est sorti vainqueur de toutes les révoltes, et à cette harmonie de l’âme qui nous frappe et nous charme dans Gœthe, — cet homme génial aussi eut une jeunesse orageuse et une vie pleine d’aventures et de rencontres de toutes sortes. On dirait que le sort s’est plu à lui donner les occasions de tout sonder, de jouir de tout, de tout éprouver, de recueillir partout des sons, des couleurs. En lisant l’histoire de sa vie, l’on voit que ce qui lui a peut-être rendu le plus grand service, lui a été le plus utile, c’est sa légèreté devenue célèbre et son égoïsme presque sans exemple dans ses relations avec ses amis et avec les femmes