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bien effrayant et qu’en général George Sand avait des notions fort peu exactes sur cette maladie, car, lorsqu’elle écrivit un an plus tard, Lélia, dans une scène des plus importantes du roman, elle représenta son héroïne parlant philosophie avec ses amis au milieu d’une attaque très intense de choléra, et terrassant le pusillanime moine Magnus par la force de son esprit et de sa libre pensée. George Sand est sans doute l’unique romancière qui ait condamné son héroïne à souffrir de cette maladie si peu poétique ; il est fort probable qu’elle même ne l’a jamais eue et que c’est à tort que ses amis ont eu peur pour elle. Si nous nous sommes permis de citer ici ce passage peut-être peu intéressant de la lettre de George Sand à sa mère, c’est parce que nous avons voulu par là excuser quelque peu cette scène de Lélia absolument invraisemblable.

Le temps alors était en général à la tristesse. Le choléra avait d’abord frappé de terreur les habitants de Paris, puis éclatèrent ces émeutes de triste mémoire, qui finirent par le massacre du cloître Saint-Merry. Enfin le choléra se propagea en province. Aurore Dudevant fut inquiète pour son mari, alors membre du jury aux assises de Châteauroux (ce qui ne manquera pas d’étonner le lecteur, s’il n’a pas encore assez remarqué combien les relations des deux époux étaient amicales même après leur séparation). Elle craignit également pour Maurice qui était resté avec son précepteur à Nohant. Cependant, toutes ces craintes furent gratuites : au mois d’août, toute la famille, saine et sauve, se réunit à Nohant.

Alors, soit qu’il se fut passé quelque chose de terrible dans la vie d’Aurore, soit qu’à chaque arrivée à Nohant elle sentit plus profondément le côté anormal de sa vie en commun avec Dudevant et se convainquit combien alors