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guait des femmes ordinaires, l’élevait au-dessus de la foule et attirait à elle tous ceux qui étaient capables de la comprendre et de l’apprécier. Elle, qui se croyait heureuse de se trouver dans la société des élus, ne soupçonnait pas qu’elle était elle-même marquée du sceau du génie.

On ne pouvait cependant pas toujours se borner au rôle de spectateurs et de dilettanti, il fallait travailler. Dans les deux dernières années qu’elle avait passées à Nohant, Aurore avait essayé de diverses occupations et « métiers » et s’était décidée pour celui d’écrivain. Nous avons dit déjà qu’il serait absolument erroné de croire que c’était après son arrivée à Paris et la rupture avec son époux, qu’elle fit tous ces essais. C’est cependant là une erreur, qui, ainsi que nous l’avons fait remarquer, se rencontre chez tous les biographes de George Sand.

En 1831 elle ne s’était donc plus « essayée » à différents métiers, mais elle se mit immédiatement à écrire pour se créer des ressources, ce que l’on peut du reste voir par toutes ses lettres publiées ou inédites. Il est très intéressant, très instructif aussi, de suivre dans cette correspondance tous les tourments et la rude école par lesquels elle eut à passer dans les premiers temps de son apprentissage littéraire. Sous ce rapport, ses Lettres nous présentent une source bien plus féconde et des données bien plus véri-

    Moi, je n’y vois qu’une erreur impraticable, et l’opinion générale en fait déjà justice, il y a une Papesse, qui n’est là que pour montrer sa robe de velours bleu de ciel et son boa de cygne. Toujours des farces !… » Les deux lettres inédites dont nous venons de citer ces passages furent depuis publiées par le vicomte de Spoelberch, auquel elles appartiennent, au nombre des dix lettres d’Aurore Dudevant à son mari, insérées dans le Cosmopolis (février 1897), et réimprimées par lui dans son excellent ouvrage, tout plein de documents et palpitant d’intérêt : Véritable Histoire de « Elle et Lui ». Paris, Calmann Lévy, 1897.