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1825 et de là allèrent aux eaux de Cauterets, il fut décidé qu’Aurore devait les accompagner pour y être traitée aussi. Les Dudevant convinrent donc d’aller avec eux aux eaux et résolurent de passer l’hiver au sud, à Guillery, en Gascogne, chez le père de Casimir, pour lequel Aurore avait beaucoup d’affection. Après avoir fêté l’anniversaire de la naissance de Maurice et d’Aurore elle-même, les Dudevant partirent le 5 juillet de Nohant pour se rendre aux Pyrénées. Outre Maurice et sa bonne Fanchon, ils prirent encore avec eux Vincent, domestique tout dévoué à Aurore.

La jeune femme quitta Nohant avec les plus sombres pressentiments et sans espoir de jamais le revoir. La pensée d’une fin prochaine semblait lui sourire. Se solitude d’esprit s’était encore accrue dans les derniers temps depuis que se mourait la vieille amitié qu’Hippolyte avait pour elle. Celui-ci avait quitté le service militaire, s’était marié bientôt après Aurore, venait souvent à Nohant, comme par le passé, et y faisait de longs séjours, ayant son quartier général soit à Paris, soit à Corbeil, ou dans la terre de sa femme à Montgivray près de Nohant. Mais alors, il avait déjà commencé à boire, et, quoique cette funeste passion, qui le mena plus tard presque à la folie, ne se fût pas encore définitivement développée, elle fit passer à Aurore des moments très pénibles. À son départ de Nohant, Aurore remarqua avec tristesse qu’Hippolyte était gai et riait en se séparant d’elle, que leur vieille amitié devait donc s’être bien refroidie. C’était encore là une nouvelle goutte de fiel pour la pauvre femme.

À cette époque où il n’y avait pas de chemins de fer et où les voyages se faisaient lentement, il fallait une bonne provision de patience pour entreprendre un si long trajet avec un petit enfant de deux ans et un mari qui s’irritait à