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point parlé d’amour, qu’il ne lui eût pas juré fidélité, qu’il n’eût pas soupiré, mais, qu’au contraire, il se fût adressé à elle presque froidement. Malgré son jeune âge, elle avait déjà eu tant à souffrir de l’excès d’amour et de passion de la part de ceux qui lui étaient les plus proches, que cette froideur la calma et la réjouit. Elle lui permit donc de s’adresser à sa mère.

Casimir n’était pas le premier qui eût recherché la main d’Aurore. Depuis son arrivée au Plessis elle avait déjà reçu plusieurs propositions. Mais c’étaient des partis dont s’occupaient ou son oncle de Beaumont, ou l’oncle Maréchal (marié, on s’en souvient, à la sœur de sa mère, Lucie Delaborde), ou Pierret, l’ami de sa mère ; tous ceux-là étaient des gens parfaitement inconnus à Aurore, mais qui, en revanche, connaissaient très bien le chiffre de sa dot. C’était si évident, que la jeune fille, malgré son manque d’expérience, refusa, sans balancer, toutes les propositions, quoique les prétendants fussent gens de noblesse et souvent riches eux-mêmes. Elle se montra cependant très prudente, comprenant qu’un refus trop raide de sa part pourrait avoir pour conséquence que sa mère, par esprit de contradiction, insistât et la forçât d’accepter. Aurore, semble-t-il, fit exception pour Casimir, ne pensant pas qu’il cherchait lui aussi un « mariage d’intérêt ». George Sand, dans l’Histoire de ma Vie, garde le silence sur ce point. Mais, si nous prenons en considération tous les faits et indices que nous trouvons dans l’Histoire et les lettres publiées ou inédites de George Sand, il en ressort avec évidence que Casimir, comme tous les autres prétendants à la main d’Aurore, voyait avant tout en elle la riche héritière ; or, la richesse — il le prouva bien dans la suite — était à ses yeux la première des vertus. Acquérir et conserver sa fortune, acquérir