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vie de couvent l’emportaient de beaucoup sur ces petits désagréments, inévitables dans tout internat. Deux ou trois querelles avec Mlle D…, chargée de la petite classe où Aurore était entrée, et une vive altercation avec la supérieure qui avait décacheté les lettres d’Aurore à sa grand’mère, dans lesquelles la fillette s’était amusée à faire des descriptions satiriques et à caricaturer le couvent et ses habitantes — événement que George Sand daigna appeler trop complaisamment « nouveau déchirement » dans sa vie, attachant trop de valeur au désenchantement et au chagrin qu’elle avait éprouvés à la nouvelle de la violation de sa correspondance — voilà, semble-t-il, à quoi se réduisent tous les désagréments qu’elle eût à supporter pendant son séjour au couvent. Ajoutons à cela les défauts habituels de ces établissements d’éducation : mauvaise nourriture, cellules et dortoirs froids, surveillance trop rigoureuse pour qu’aucun bruit du monde extérieur n’arrive aux élèves, et nous aurons tous les côtés désagréables de la vie d’Aurore chez les Dames Augustines. Sa vie de couvent avait cependant pour elle de si bons côtés que les mauvais ne peuvent pas être mis en balance.

D’abord, malgré l’insuffisance des études que l’on y faisait, c’étaient pourtant des études systématiques et réglées ; et si, après trois ans, Aurore n’y acquit pas de trop amples connaissances, elle y apprit du moins, outre l’anglais, qu’elle posséda à fond, à travailler tous les jours d’une manière régulière. George Sand raconte avec beaucoup d’humour que, quoique sa grand’mère et elle fussent très fières de ses brillantes connaissances, il se trouva que la petite philosophe, l’écrivain d’ « exercices de style » ne savait pas même faire le signe de la croix comme il faut, et scandalisa la maîtresse et égaya toute la petite classe par