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divin leur repos et leur félicité. Et l’âme d’Aurore, naturellement portée vers l’idéal religieux, « tourmentée de choses divines, » trouva l’aliment qu’il lui fallait, la foi à Laquelle elle aspirait inconsciemment. C’est là qu’elle puisa cette forte croyance en Dieu, en l’immortalité de l’âme, qui ne l’abandonna plus durant toute sa vie, lui faisant franchir, sans y sombrer, les périodes du désespoir le plus profond et de la critique la plus libre en matière de dogme. Par nature, c’était une âme religieuse qui ne changea jamais, quoique le nom de George Sand fasse jusqu’à présent l’épouvantail des dévots et que ses livres se trouvent toujours à l’index. Il ne viendra sans doute pas de sitôt le jour rêvé par le personnage inconnu et mystérieux dont parle le vicomte de Spoelberch dans ses Lundis d’un chercheur : « Aussi, à propos de certaines pages spéciales de l’auteur de Lélia, de certains appels au Créateur, pleins d’éloquence et de foi, avons-nous entendu sans surprise un membre distingué du clergé français nous exprimer l’opinion, qu’à son avis, l’avenir réservait à ces élans enflammés, à ces supplications entraînantes, l’étonnant retour de fortune d’être un jour cités en chaire comme d’admirables exemples de prière ardente et chrétienne[1]… »

Aurore Dupin passa trois ans au couvent des Augustines Anglaises, de l’hiver 1817-1818 jusqu’au printemps de 1820. Elle assure que ce furent peut-être là les années les plus heureuses de sa vie. Depuis sa naissance, la fillette se trouvait en effet pour la première fois dans un milieu plus ou moins normal et calme, bien que, là aussi, tout ne passât pas sans petites collisions entre élèves et supérieures, mais les bonnes impressions et les bons côtés de la

  1. Les Lundis d’un Chercheur, par le vicomte de Spoelberch de Lovenjoul. (Paris, 1814. Calmann-Lévy), p. 157-158.