Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome X, 1826.djvu/205

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

car il y allait du sort de Moscou, dont le salut ou la perte dépendait du vainqueur. Le peuple, tantôt gardait le plus morne silence, tantôt jetait des cris, suivant des yeux tous les mouvemens de ce combat meurtrier. Spectacle toul-à-fait nouveau pour notre antique Capitale, qui avait vu ses murs escaladés, mais qui n’avait pas encore été témoin d’une bataille rangée dans ses plaines. On n’avait pas besoin de courriers, l’œil dirigeait le sentiment de l’effroi ou de l’espérance. Quelques-uns ne voulaient rien voir, et prosternés devant les saintes images, baignaient de leurs larmes le pavé des églises, où le chant des prêtres était couvert par le bruit des armes à feu, et où l’odeur de l’encens se mêlait à la fumée de la poudre. Un fait presqu’incroyable, c’est que, dans ce moment solennel et décisif, lorsque les cœurs battaient avec force, même dans les viellards centenaires de Moscou, un seul homme goûtait la paix d’une âme inébranlable ; celui dont le nom était invoqué par les Russes en même temps que celui de Dieu, dans le combat ; celui pour lequel ils mouraient devant les murs de la Capitale, le Monarque lui-