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faiblesses et même à la cruauté, sans prévoir les suites qui pourraient en résulter. Par exemple, le jeune prince, amateur de la chasse, se plaisait non-seulement à répandre le sang des bêtes sauvages, mais il se faisait aussi un plaisir de faire souffrir les animaux domestiques ; et, lorsqu’il lui arrivait d’en précipiter quelques uns du haut d’un escalier élevé, les boyards se contentaient de dire : « Soit ! puisque cela divertit le souverain. » Quelquefois, entouré d’une troupe de jeunes gens, lui arrivait-il de se livrer à sa pétulance, et de se conduire d’une manière indécente, de galopper dans les rues, écrasant des femmes et des vieillards, on ne faisait qu’en rire, et lui-même se félicitait de ces coupables étourderies, parce que d’imprudens flatteurs vantaient alors son audace, son intrépidité et son adresse. Les boyards étaient loin de songer à lui faire connaître les devoirs sacrés que doit remplir un souverain, car, eux-mêmes, ils négligeaient les leurs ; et au lieu d’éclairer, de cultiver son jeune esprit, ils se plaisaient à l’entretenir plutôt dans une ignorance qui s’accordait mieux avec leurs vues ambitieuses ; enfin ils parvinrent à endurcir son cœur, tournant en ridicule les larmes que les infortunés Telennef, Belzky et Voronzof lui avaient fait répandre. Ils