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1584. attendrissement prenait-il sa source dans les craintes que la faiblesse de Féodor inspirait sur le sort de l’État ? Était-ce pour payer le tribut d’une religieuse pitié au monarque défunt, bien qu’il eût été féroce et sanguinaire ?… Ses obsèques eurent lieu avec une grande pompe, dans l’église de Saint-Michel. Les assistans versaient des pleurs ; toutes les physionomies exprimaient l’affliction, et la terre reçut dans son sein les restes de Jean-le-Terrible ! L’opinion des hommes était muette devant le jugement de Dieu, et pour ses contemporains le rideau tomba sur la scène de son existence. Les souvenirs et les tombeaux restèrent pour la postérité !

Attachement des Russes au pouvoir absolu. Parmi les nombreuses et cruelles épreuves accumulées par le destin sur la Russie, après les calamités du système féodal, soustraite à peine au joug des Mogols, elle avait dû se voir encore la proie d’un tyran ! Elle le supporta, et conserva l’amour de l’autocratie, persuadée que Dieu lui-même envoyait parmi les hommes la peste, les tremblemens de terre et les tyrans. Au lieu de briser entre les mains de Jean le sceptre de fer dont il l’accablait, elle se soumit au destructeur pendant vingt-quatre années, sans autre soutien que la prière et la patience, afin d’obtenir, dans des temps plus heureux, Pierre-