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1582. Pendant le cours des négociations pour la paix, touché de l’état déplorable de la Russie, apercevant l’expression de la douleur sur toutes les physionomies, instruit sans doute du mécontentement général, le tzarévitch se sentit animé d’un noble zèle. Aussitôt il va trouver son père et lui demande d’être envoyé avec des troupes pour chasser l’ennemi, délivrer Pskof et relever l’honneur de la Russie. Cette généreuse proposition excite le courroux de Jean : « Rebelle, s’écrie-t-il, tu veux me détrôner, de concert avec les boyards ! » Et il lève le bras contre son fils. Boris Godounof essaie en vain de l’arrêter ; le tzar avec son bâton ferré lui fait plusieurs blessures, et d’un coup violent sur la tête du tzarévitch, il renverse l’infortuné baigné dans son sang. À cet aspect, la fureur de Jean s’évanouit. Frappé de terreur, pâle, tremblant, il s’écrie avec l’accent du désespoir : malheureux, j’ai tué mon fils !…. Il se jette sur lui en versant des larmes. Il l’embrassait, essayant d’arrêter le sang qui coulait d’une profonde blessure ; il appelait à grands cris le secours des médecins ; il implorait la miséricorde de Dieu et le pardon de son fils…. Mais la justice céleste venait d’accomplir ses décrets !…. Le tzarévitch, baisant les mains de son père, lui prodiguait de tendres