Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome IX, 1825.djvu/27

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1560 — 1561. les épanchemens de l’amitié, devinrent l’objet de soupçonneuses investigations : on étudiait le mouvement de la physionomie ; on cherchait à deviner le fond de la pensée ; et comme on connaissait le goût du tzar pour la délation, d’infâmes calomniateurs ne rougissaient point de forger des crimes, pour lesquels le juge n’exigeait aucune preuve authentique. C’est ainsi que, sans aucun motif valable, sans aucune forme de procès, on fit périr le prince Kaschin, membre du conseil, et son frère. Le prince Kourliateff, ami des Adascheff, contraint d’abord à prendre l’habit monastique, fut, bientôt après, condamné à mort avec toute sa famille. Le prince Vorotynski, premier seigneur de la cour, illustre serviteur du monarque, vainqueur des Kazanais, fut exilé à Bielo-Ozéro avec sa femme, son fils et sa fille. La terreur des barbares de Crimée, le voïévode et boyard Schérémétieff, fut jeté dans un affreux cachot, mis à la question, chargé de chaînes. Le tzar vint le visiter et lui demanda froidement : « Où sont tes trésors ? tu passais pour riche. — Mes trésors, seigneur, lui répond le malheureux boyard à demi-mort, je les ai envoyés à Jésus-Christ, mon sauveur, par la main des pauvres. » Il fut élargi, et occupa pendant quelques années