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1570. pas la mort, consolés par l’idée d’une autre vie où la vertu reçoit sa récompense et à laquelle celle de ce bas monde doit servir d’épreuve……

Famine et peste. Terminons le tableau des malheurs de ce temps : la peste et la famine aidaient le tyran à dépeupler la Russie. Il semblait que la terre eût perdu sa fertilité, et le froid ou la sécheresse, détruisant les faibles récoltes dont elle se couvrait, occasionnèrent dans le prix des denrées une cherté si excessive, que le tchetvert de seigle se payait, à Moscou, environ 9 roubles d’argent de notre monnaie actuelle. Les marchés étaient encombrés d’une foule de pauvres, qui s’informaient avec effroi du prix des grains et poussaient des cris de désespoir ; la ressource des aumônes diminuait tous les jours, et l’on voyait même recourir à la charité d’autrui, ceux qui avaient, jusqu’alors, nourri les indigens. Semblables à des ombres, les hommes se traînaient dans les rues, sur les grandes routes, où ils tombaient épuisés de faim et de misère. Il n’y avait pas de révolte ouverte, mais il se commettait quantité de crimes épouvantables : dans des accès de frénésie, poussés par le besoin, des malheureux assassinaient leurs semblables pour se repaître de leur chair (73). L’affaiblissement des forces vitales, une nourriture si peu naturelle