Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome IX, 1825.djvu/212

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1570. plus doux dans l’avenir !…… Après avoir assassiné plus de cent personnes, le farouche exterminateur s’en retourna triomphant dans son palais, aux cris ordinaires de ses satellites, Hoïda ! Hoïda ! et se remit à table (72) !… Cependant, à cette époque même, le cri de l’humanité se faisait quelquefois entendre, et au milieu de ces sanguinaires orgies, des paroles d’une généreuse audace échappaient aux opprimés. Le tzar ayant voulu forcer un nommé Mitkof à vider une coupe d’hydromel vineux, cet homme courageux s’écria avec l’accent de la douleur : Ô tzar ! tu nous ordonnes de boire avec toi de l’hydromel mêlé au sang des chrétiens, nos frères ! À ces mots, Jean lui assène un coup de son bâton ferré et l’étend à ses pieds ! Mitkof, ayant fait un signe de croix, expira en récitant des prières.

Tels étaient et le tzar et ses sujets ! Qui de lui ou d’eux doit nous étonner davantage ? S’il ne fut pas le plus grand des tyrans, ils furent les plus résignées des victimes, parce qu’ils regardaient le pouvoir souverain comme celui de Dieu même, et toute résistance comme une impiété. Cette tyrannie leur paraissait un effet du courroux céleste, en punition de leurs péchés, et, pénétrés de foi, d’espérance, ils attendaient le jour de la miséricorde ; mais ils ne redoutaient