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1565. le monde se mettait à table, excepté Jean qui lisait, debout et à haute voix, de salutaires instructions (13). L’abondance régnait dans les repas : on y prodiguait le vin, l’hydromel, et chaque jour paraissait un jour de fête. Les restes du festin étaient portés sur la place publique pour être distribués aux pauvres. L’abbé, c’est-à-dire le tzar, dînait après les autres (14) ; il s’entretenait, avec ses favoris, des choses de la religion, sommeillait ensuite, ou bien allait dans les prisons pour faire appliquer quelques malheureux à la torture. Ce spectacle horrible semblait l’amuser : il en revenait chaque fois avec une physionomie rayonnante de contentement. Il plaisantait, il causait avec plus de gaîté que d’ordinaire (15). À huit heures on allait à vêpres ; enfin à dix, Jean se retirait dans sa chambre à coucher où, l’un après l’autre, trois aveugles lui faisaient des contes, qui l’endormaient pour quelques heures. À minuit il se levait et commençait sa journée par la prière (16) ! Quelquefois on lui faisait à l’église des rapports sur les affaires du gouvernement ; quelquefois les ordres les plus sanguinaires étaient donnés au chant des matines ou pendant la messe (17) ! Pour rompre l’uniformité de cette vie, Jean faisait ce qu’il appelait des tournées. Il visitait