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1560 — 1561. afin de s’approprier la gloire et le succès de son règne, auxquels ils mettaient en même temps des obstacles, en conseillant à leur maître la modération dans la bonne fortune, comme s’ils craignaient que trop de gloire ne lui donnât le sentiment de sa grandeur, et ne vînt contrarier leur ambition. « Quels sont, disaient-ils, ces hommes assez téméraires pour dicter des lois à un prince grand et sage ; qui, non-seulement s’ingèrent dans l’administration de l’État, mais jusque dans ses affaires domestiques, jusque dans sa manière de vivre, et osent lui prescrire des règles de conduite envers son épouse ; qui lui mesurent le boire et le manger ? » En effet, Sylvestre, directeur de la conscience de Jean, avait toujours exigé de lui la sobriété, la modération dans les plaisirs des sens ; et le jeune monarque, trop enclin à s’y abandonner, était loin d’imposer silence à la calomnie, car, déjà fatigué des sévères leçons de ses amis, il voulait devenir son maître : il ne songeait point encore à abandonner la vertu ; il désirait seulement secouer le joug de ses conseillers, et prouver qu’il pouvait se passer de leurs avis. Quelquefois son impétuosité naturelle se manifestait par des paroles indiscrètes ou des menaces. On écrit que, peu après la prise de